Interview
PFBC-COMIFAC, le Ministre DJOMBO livre ses impressions à la suite de la 4ème plénière du PFBC tenue à N’Djamena, au Tchad du 20 au 21 septembre 2012.
Afrique Environnement Plus : Vous venez de prendre part aux assises communautaires de la sous-région sur la gestion forestière et le braconnage et la lutte contre la désertification organisées par le PFBC. Quelle lecture faites-vous du fonctionnement de cette institution, et qu’est ce que vous en pensez ?
Henri DJOMBO : Le partenariat pour les forêts du bassin du Congo a été lancé en 2002 à Johannesburg par les Etats Unis et le Congo. Respectivement par Collins POWELL, Secrétaire d’Etat américain et le Président Denis SASSOU NGUESSO. C’était une coalition mondiale qui s’était créée autour de la gestion durable des forêts du Bassin du Congo, avec l’espoir qu’on arrêterait les objectifs communs, et les moyens de mise en œuvre qui nous permettraient d’atteindre, dans un délai de 1O ans, des résultats probants. Au cours de la marche de notre processus, nous pouvons constater que le partenariat est un géant aux pieds d’argile qui, malheureusement, n’a pas mis en place des stratégies pour financer durablement le processus et nous permettre d’atteindre les objectifs escomptés, préférant privilégier les coopérations bilatérales, alors que l’Afrique Centrale ne le souhaitait pas, parce que c’est une coopération, en général, sans valeur ajoutée et qui ne concerne que les actions ciblées, avec les moyens réduits, dans un délai limité, sans compter que l’argent retourne souvent vers les pays donateurs. Ce n’est malheureusement pas avec les fonds d’une telle coopération qu’on peut lancer un programme environnemental d’envergure comme la gestion durable des forêts du bassin du Congo ou la conservation des écosystèmes de ce bassin. Mais aujourd’hui, 7 ans après l’adoption du Plan de Convergence qui est le plan stratégique de la gestion de ce bassin, on n’a pas obtenu beaucoup d’appuis de la communauté internationale. Les pays se sont débrouillés comme ils l’ont pu, beaucoup d’opérations ont été réalisées par le secteur privé. Jusqu’au moment où nous célébrons le 10ème anniversaire de ce partenariat, nous pouvons dire que nous n’avons pas encore réussi, sans insinuer pour autant qu’on a échoué.
Afrique Environnement Plus : Pensez-vous qu’il y ait encore un espoir pour que le PFBC atteigne les objectifs qui lui avaient été assignés à la base ?
Henri DJOMBO : Nous demeurons tout de même optimistes quoiqu’après tout ce qu’on a entendu, vu, je ne crois pas qu’il y aura une grande avancée. Si nous ne sommes pas dans un processus de solidarité réelle, il va falloir commencer à réfléchir sur des sources nouvelles de financement, sur le transfert des technologies, sur la manière d’obtenir ces technologies, sur le renforcement des capacités, à partir des ressources propres de la sous-région. Nous osons croire encore que les financements internationaux dédiés à l’environnement et pourquoi pas aux forêts vont arriver. Mais, aucun d’eux ne dispose d’une gouvernance claire, de modalités d’allocation des ressources, de décaissement de ces ressources. Somme toute, rien n’est clair : il va falloir définir préalablement ces gouvernances et les principes de base qui devraient régir ces financements. Sinon, ce sera comme le cas pour le financement des fonds Fast Start : 3O milliards prévus à Copenhague pour financer en 2010, 2011 et 2012, les actions multiples concernant le climat ; malheureusement, cet argent on ne l’a pas vu. Pourtant, dans les bilans des partenaires, c’est de l’argent qui a été décaissé. Et on ignore comment cet argent n’a pas pu arriver sur le terrain. On se rend alors compte que ce sont des engagements qui dataient de 5 ans avant Copenhague, que cet argent a été utilisé à une fin autre que celle initialement prévue. Ce sont là des conditions qui ne peuvent permettre d’entretenir la confiance entre donateurs et bénéficiaires. Il est donc impérieux que tout cela change. D’où, la définition préalable des gouvernances pour plus de transparence.
Afrique Environnement Plus : Il a été annoncé la tenue prochaine d’un Forum national sur le développement durable, quel est le but visé par cette initiative ?
Henri DJOMBO : Nous avons voulu attendre l’après Rio pour tirer les conclusions de cette grande conférence mondiale et engager notre propre stratégie de développement durable au niveau national. Il faudra que nous lancions le Congo dans cette perspective pour qu’il puisse contrôler son avenir, son développement. Il faut donc engager le pays dans la voie de la durabilité, que chaque secteur s’approprie le développement durable. Tous les plans ou programmes sectoriels doivent être mis en conformité et les priorités bien définies, pour assurer la mise en œuvre des projets qui seront lancés, afin que le plan national de développement 2012-2016, soit la base de départ de cette planification stratégique. La première phase comptera 5 ans, on déterminera la durée des autres phases. Mais, en fait, il faut se projeter jusqu’à 2O5O pour que nous ayons le recul nécessaire pour planifier cet avenir, mobiliser les forces vives de la nation, rassurer les congolais de ce que leur pays va se lancer sur l’orbite du développement et que les générations actuelles et futures pourront jouir d’une amélioration progressive de leurs conditions de vie et que les ressources naturelles renouvelables seront exploitées à bon escient. Ainsi, nous pourrons vivre ensemble la transformation de notre société et le visage physique de notre pays. Il faut que tous les acteurs, les secteurs d’activité comprennent le sens du développement durable.
Interview réalisée par Raoul SIEMENI