3 septembre 2016, Honolulu, Hawai’i (UICN) – La population de baleines grises occidentales en danger critique, qui se nourrit dans les eaux de l’Extrême-Orient russe, montre de lents signes de redressement, mais son effectif et son aire de répartition sont toujours menacés par l’activité industrielle de la région, affirme un nouveau rapport publié aujourd’hui au Congrès mondial de la nature de l’UICN.
Le rapport conjoint de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), du WWF et du Fond international pour la protection des animaux (IFAW) passe en revue le travail d’un groupe indépendant de scientifiques conduit par l’UICN, qui conseille Sakhalin Energy – l’une des plus importantes entreprises opérant dans la zone – dans le cadre d’un accord de prêt innovant. Au cours des 12 dernières années, Sakhalin Energy a fait des efforts importants pour limiter l’impact de ses opérations sur les baleines et le fragile environnement de cette zone. Pendant cette période, la population de baleines grises occidentales a augmenté de 3-4% tous les ans, passant de 115 animaux estimés en 2004 à 174 en 2015.
La population de baleine grise occidentale est actuellement classée En danger critique dans la Liste rouge de l’UICN des espèces menacéesTM.
« Ce qui a commencé il y a 12 ans comme une réponse au conflit grandissant entre environnementalistes et industrie du pétrole et du gaz à propos d’une population de baleines en danger critique a eu des répercussions positives multiples pour la conservation et les entreprises » affirme ainsi la Directrice générale de l’UICN, Inger Andersen. « L’UICN a montré que les groupes scientifiques indépendants sont un mécanisme efficace pour obtenir des solutions solides et fondées sur des données factuelles et ainsi faire face aux défis de développement et d’environnement les plus pressants de l’heure. »
Cependant, le rapport signale également que l’approfondissement de la coopération et de l’implication de toutes les entreprises et industries de la région – y compris les entreprises pétrolières et gazières et les entreprises de pêche – est essentiel pour garantir des bonnes pratiques et la protection à long terme des animaux.
« L’augmentation annuelle du nombre de baleines de Sakhalin est encourageante, cependant leur redressement sur le long terme dépendra du ralliement d’un nombre plus important d’entreprises dans la région » affirme Doug Nowacek, spécialiste renommé du comportement des baleines et membre du Groupe consultatif sur la baleine grise occidentale. « Sakhalin Energy a démontré qu’il est possible, pour les entreprises, d’atténuer leurs impacts et de continuer à opérer efficacement. Mais d’autres entreprises à Sakhalin doivent encore prendre des mesures similaires pour lutter contre le problème des impacts cumulatifs de l’industrie sur le milieu marin. »
Le rapport, intitulé Stories of influence, montre l’importance des répercussions positives générées par ce groupe pour les entreprises et la conservation. Il se base sur des interviews réalisées avec plus de 20 experts et parties prenantes engagés dans le processus. Au cours des 12 dernières années, le groupe a publié plus de 539 recommandations à destination de Sakhalin Energy et d’autres parties, dont 90% ont été mises en œuvre ou remplacées par des conseils ultérieurs. Le processus incluait des bailleurs de fonds et des responsables gouvernementaux, ainsi que des ONG agissant au titre d’observateurs.
Parmi les réalisations notables, citons la décision par Sakhalin Energy de modifier le tracé de son pipeline afin de minimiser les perturbations et l’impact sur les aires d’alimentation des baleines. Le groupe a mobilisé une recherche scientifique innovante, notamment un programme de marquage par satellite ayant permis de documenter la plus grande migration entamée par un mammifère – un voyage de 10 880 kilomètres partant de Sakhalin jusqu’aux aires de mise bas d’été, dans la péninsule de Basse-Californie du Mexique. En outre, le travail du groupe a également permis de mettre en place pour les entreprises l’un des plans les plus complets de suivi et d’atténuation pour les études sismiques, aujourd’hui considéré comme le guide mondial de l’industrie.
L’UICN a créé ce que l’on nomme aujourd’hui le Groupe consultatif sur la baleine grise occidentale en 2004, pour répondre aux préoccupations croissantes sur les plans d’expansion de Sakhalin Energy dans la mer d’Okhotsk, et l’impact qu’ils pourraient avoir sur les baleines en danger critique résidant au large de l’île de Sakhalin. Le tollé d’ONG opposées à ces projets finit par persuader les bailleurs de lier un certain nombre de conditions d’atténuation à l’accord de prêt, notamment l’obligation pour Sakhalin Energy de financer un groupe indépendant géré par l’UICN et chargé fournir des recommandations sur leurs opérations.
« Le Groupe consultatif sur la baleine grise occidentale a réduit l’impact de ces opérations pétrolières et gazières sur l’une des baleines les plus menacées dans le monde, ce dont les bailleurs de ce projet peuvent être fiers » insiste Wendy Elliott, Vice-responsable Global Wildlife, WWF International. « Nous encourageons d’autres institutions financières à reproduire ce succès en incluant des conditions restrictives similaires lors de l’approbation de prêts pour des projets ayant des impacts potentiellement préjudiciables sur des espèces sauvages menacées et leurs habitats. »
Sakhalin Energy reconnaît que l’intégration de la science dans la gestion et les politiques de l’entreprise a eu un impact positif sur ses opérations, et se reflète désormais dans la vision de l’entreprise.
Lors du lancement du rapport, l’UICN a confirmé son intention de signer un autre accord quinquennal avec Sakhalin Energy pour continuer ce travail. Dans le cadre du nouvel accord pour la période 2017-2021, le Groupe consultatif sur la baleine grise occidentale continuera à offrir des conseils scientifiques indépendants à l’entreprise. Par ailleurs, le Groupe a récemment créé un groupe de travail chargé d’étudier dans quelle mesure des conditions similaires de prêt pourraient être intégrées à l’avenir, afin d’accroître les mesures en faveur de la conservation.
Pendant le Congrès qui se déroule du 1e au 10 septembre, plusieurs événements étudieront la gestion des impacts de l’exploitation du pétrole et du gaz sur le milieu marin, ainsi que l’efficacité des groupes consultatifs scientifiques indépendants, comme le Groupe consultatif sur la baleine grise occidentale, pour résoudre les conflits environnementaux au nom des gouvernements et des entreprises. En outre, s’appuyant sur l’expérience du Groupe consultatif sur la baleine grise occidentale, l’UICN a publié un nouveau guide, conçu pour aider les industries à concevoir et à réaliser des études géophysiques responsables et efficaces. |