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Environnement

Bénin : La femme rurale ignorée dans la riposte au changement climatique

[COTONOU] Selon une récente étude dont les résultats ont été présentés le 13 janvier 2021 à Cotonou, les femmes des milieux ruraux sont les laissées pour compte dans les politiques, programmes et initiatives de lutte contre les changements climatiques au Bénin, malgré leur vulnérabilité à ce phénomène.

Menée par le Laboratoire climat, écosystème, eau et développement (LACEEDE) en partenariat avec le Centre de recherche pour le développement international (CRDI), cette étude est la première étape de la mise en œuvre du projet « genre, équité et changement climatique » piloté par le Centre de recherche et d’expertise pour le développement local (CREDEL).

Cette vulnérabilité des femmes aux changements climatiques, associée au niveau de compréhension des décideurs politiques nationaux face à cette vulnérabilité, a été analysée dans huit localités rurales du Bénin : Ouidah, Athiémé, Adja-Ouèrè, Ouinhi, Glazoué,  Savè et Djougou Ouaké…

“Il n’y a aucune stratégie ou politique en place pour permettre à la femme au Bénin de s’adapter et d’être résiliente aux changements du climat”

Didier Hubert Madafimè, consultant

« Dans les documents de politiques qui ont été analysés, nous avons constaté que la question du genre n’est pas suffisamment prise en compte pour l’adaptation et la gestion des changements climatiques au Bénin », explique Yabi Ibouraima, professeur d’agroclimatologie à l’université d’Abomey-Calavi et membre du LACEEDE.

Le défaut de connaissances sur la vulnérabilité des femmes face aux changements climatiques est un facteur qui fait que les femmes sont oubliées dans les politiques et programmes de gestion du changement climatique, explique pour sa part Parfait Blalogoé, directeur du CREDEL.

Selon ce dernier, les décideurs politiques « savent que les changements climatiques impactent tout le monde ; et par rapport à cela, ils définissent des politiques communes pour tout le monde en pensant ainsi répondre aux préoccupations de tout le monde sans jamais se demander si le phénomène impacte de la même manière toutes les composantes de la société ».

Pourtant, cette étude précise que les femmes qui vivent dans les localités rurales sont doublement vulnérables aux changements climatiques du fait de leur statut social et d’un certain nombre de normes et croyances qui limitent leur accès aux ressources.

Barrières

Elle déplore également un certain nombre de barrières qui font que leurs besoins d’adaptation ne sont pas pris en compte dans les politiques et programmes de gestion des changements climatiques.

Un aspect que confirme Didier Hubert Madafimè, spécialiste et consultant sur les questions environnementales pour plusieurs organismes. Ce dernier soutient que les femmes des régions rurales sont fortement victimes des effets des changements climatiques en raison de leur pouvoir de décision très limité et de leur faible accès à la terre et surtout aux responsabilités domestiques qu’elles assument en dehors des travaux agricoles.

Par exemple, explique-t-il, au début de la saison des pluies, les femmes des milieux ruraux sont tenues, avec l’aide des enfants, d’aider le père de famille à faire son champ. Et ce n’est qu’après qu’elle peut s’occuper de son propre champ avec des risques de ne pas achever ces travaux à temps ; ce qui peut entraîner de mauvais rendements agricoles.

« Il n’y aucune stratégie ou politique en place pour permettre à la femme au Bénin de s’adapter et d’être résiliente aux changements du climat. Il est mis en place un point focal genre sans moyen d’entreprendre des initiatives visant à prendre en compte la femme dans la lutte contre les effets du climat », regrette Didier Hubert Madafimè dans un entretien avec SciDev.Net.

Parfait Blalogoé renchérit en disant que les besoins liés spécifiquement à la femme ne sont pas considérés lorsqu’il s’agit d’introduire dans les projets agricoles par exemple les semences améliorées ou lorsqu’on parle des techniques de restauration des terres.

Plaidoyer

Aussi l’étude recommande-t-elle une série de mesures à l’intention des autorités du Bénin pour une meilleure intégration des femmes des milieux ruraux dans les politiques et programmes de gestion du changement climatique.

« Il est nécessaire de former les acteurs de gestion des politiques et programmes de changement climatique à la démarche de prise en compte des besoins spécifiques des femmes dans les documents de planification et de gestion », indique Yabi Ibouraima.

Pour Parfait Blalogoé, il est également indispensable de faire « un plaidoyer auprès des décideurs pour leur montrer que la femme est doublement vulnérable par rapport aux questions de changement climatique et qu’il est nécessaire de prendre en compte ses besoins pour mieux gérer ces questions au niveau national en vue de faciliter son adaptation et renforcer sa résilience au phénomène ».

Pour cela, le CREDEL compte former les cadres à différents niveaux de l’administration à l’élaboration d’une démarche de prise en compte des questions de changement climatique dans les documents de politique.

Au même moment, estime Parfait Blalogoé, « les femmes au niveau communautaire doivent être sensibilisées pour prendre conscience de leur vulnérabilité et développer des pratiques qui leur permettent de renforcer leur résilience ».

Par: Christophe Assogba

https://www.scidev.net/

 

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