Une étude publiée le 2 juin 2020 dans la revue Conservation Biology révèle comment la hausse des investissements chinois en Amérique centrale et du Sud est corrélée à l’intensification du trafic illégal de jaguars vers l’Empire du Milieu.
Le trafic illégal de jaguars en Amérique centrale et du Sud est-il en partie lié aux investissements chinois sur le continent ? C’est en tout cas ce qu’avance une étude publiée le 2 juin 2020 dans la revue Conservation Biology.
Intitulée “Le commerce illégal de félins sauvages et son lien avec le développement mené par les Chinois en Amérique centrale et du Sud”, l’étude affirme que plus de 800 jaguars ont été tués entre 2012 et 2018 dans la région, uniquement pour le marché chinois.
Une situation jugée préoccupante par l’auteur principal de l’étude, Thais Morcatty, qui s’est exprimé dans le magazine National Geographic. Le doctorant en anthropologie à l’université d’Oxford Brookes, en Angleterre, a enquêté sur les raisons de ce lien.
Les dents de jaguar très prisées
Les auteurs ont donc réuni les données de plus de 1000 grands félins (jaguar, puma et ocelot) saisis entre 2012 et 2018 dans 19 pays d’Amérique centrale et du Sud ainsi qu’en Chine.
Il apparaît que les pays concernés par ce trafic ont un niveau de corruption élevé et un faible revenu par habitant. Mais ces Etats ont un autre point commun : un niveau élevé d’investissements privés chinois. En Amérique centrale et du Sud, les investissements de l’Empire du Milieu ont été multipliés par dix au cours de la dernière décennie, détaille l’étude. Des investissements très positifs pour le continent, stimulant l’activité économique et le développement où ils sont réalisés, mais qui sont aussi corrélés à une hausse du trafic illégal de jaguars. Ces pays “ont enregistré 10 à 50 fois plus de saisies de jaguars que les autres pays de l’échantillon” note l’étude. Il s’agit du Brésil, de la Bolivie, de la Colombie, du Pérou et du Suriname.
« Ce que nous pouvons apprendre de cela, c’est que les modèles que nous avons vus en Asie puis en Afrique commencent maintenant à émerger en Amérique du Sud« , a déclaré Vincent Nijman, co-auteur de l’étude, dans les colonnes du New York Times.
La pauvreté et la présence chinoise stimuleraient donc ce trafic. Les dents de jaguar sont les parties les plus prisées, utilisées dans les bijouteries chinoises. 1991 canines ont été saisies par les autorités entre 2012 et 2018.
Le jaguar est un animal présent à l’état sauvage sur une aire s’étendant du Mexique à l’Argentine. Il est aujourd’hui considéré comme “quasi menacé” par l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN). Les populations de l’animal disparaissent principalement à cause de la perte de leur habitat (déforestation) et des conflits avec les habitants des régions où elles se trouvent, en particulier avec les agriculteurs. De nombreux projets de conservation comme celui de Yara Barros, que nous avions rencontré au Brésil, œuvrent pour la protection de l’animal.
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