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Environnement

L’Afrique à l’assaut de la finance verte

Àl’occasion des assemblées annuelles de la Banque africaine de développement (BAD) fin juin, une des conférences était organisée sur le thème du « changement climatique et de la croissante verte ». Les intervenants ont mis l’accent sur l’urgence d’une action globale et l’augmentation des financements climatiques. En réalité, le continent se retrouve confronté à un double défi : relancer la croissance économique après la pandémie du Covid-19, tout en donnant la priorité à la résilience climatique et ) la relance verte.

« Les pays africains comptent pour moins de 4 % des émissions de gaz à effet de serre, mais subissent les pires effets du changement climatique », a rappelé Akinwumi Adesina, président de la BAD. La priorité pour l’Afrique est donc plus à l’adaptation qu’à l’atténuation. Après les pôles, elle est reconnue comme la région la plus exposée aux changements climatiques. Sécheresses, cyclones, inondations frappent de plus en plus durement le continent. En 2020, les criquets pèlerins ont dévasté les récoltes dans la Corne de l’Afrique.

La BAD investit dans le climat

Le climat est devenu une préoccupation majeure pour la BAD. La proportion de fonds alloués au changement climatique est ainsi passée de 9 % en 2016 à 35 % en 2019 (soit près de 3,6 milliards de dollars) et devrait atteindre 40 % en 2021. Depuis l’entrée en vigueur de l’accord de Paris en 2016, la Banque a investi 12,3 milliards de dollars dans des actions liées au climat et s’engage à mobiliser 25 milliards de dollars de financement climatique pour l’Afrique d’ici à 2025, en accordant la priorité à l’adaptation, a expliqué M. Adesina.

La BAD apporte un soutien financier massif au développement des énergies renouvelables. Elle était chef de file dans le projet du plus grand parc éolien d’Afrique subsaharienne, celui du lac Turkana (70 mégawatts) au Kenya, inauguré en 2019. Cette année, elle a validé un prêt de 27 millions de dollars pour la construction de la centrale solaire de Kom Ombo en Égypte. Elle appuie aussi l’initiative « Électrification du désert » de 10 gigawatts, dont l’objectif est de fournir de l’électricité à 250 millions de personnes dans le Sahel. Toujours dans ses engagements en faveur du climat, elle soutient le projet de la Grande Muraille verte, qui vise à stopper la désertification du Sénégal à Djibouti, soit 8 000 kilomètres. Un projet lancé il y a 15 ans qui peine à se concrétiser.

Solutions innovantes : des obligations vertes et bleues

Afin de financer les projets qui permettent de lutter contre le changement climatique et favorisent la croissance durable, les banques de développement, acteurs clés dans la levée des fonds pour le climat, doivent explorer de nouvelles pistes dans un contexte plus difficile. Yannick Glemarec, directeur général du Fonds vert pour le climat (FVC), a souligné une difficulté majeure qui s’est accentuée avec la crise économique provoquée par la pandémie du Covid : comment augmenter les investissements climatiques sans accroître l’endettement des pays ? « Une transition rapide vers une économie résiliente à effet climatique zéro nécessitera beaucoup plus d’investissements qui traitent des impératifs humanitaires, de l’inclusion sociale et de la réduction de la pauvreté », prévient-il.

Dans ce contexte de ressources rares, les institutions financières de développement se tournent vers des outils financiers innovants. En janvier dernier, la Banque ouest-africaine de développement (BOAD) a lancé la première obligation à objectif de développement durable du continent, dite obligation verte. L’opération a permis de lever 750 millions d’euros, sur une maturité de douze ans, au taux très attractif de 2,75 %, bien inférieur au prix du marché. Les ressources collectées doivent être investies dans des projets à fort impact social et environnemental, en accord avec les objectifs de développement durable (ODD) des Nations unies. Les secteurs prioritaires couvrent l’agriculture et la sécurité alimentaire, les énergies renouvelables, les infrastructures de base, la santé, l’éducation et l’habitat social.

Peu de temps après, la Banque de développement d’Afrique du Sud (DBSA) lui a emboîté le pas, avec l’émission de sa première obligation verte de 200 millions d’euros. Un emprunt lancé dans le cadre d’un placement privé auprès de l’Agence française de développement (AFD). Accréditée auprès du FVC, la DBSA a reçu en 2019 une enveloppe de 56 millions de dollars pour le financement des projets climatiques dans les pays d’Afrique australe.

Finalement, dans l’adoption de ces outils financiers innovants, c’est l’archipel des Seychelles qui fait figure de pionnier. Ce pays a émis la première obligation bleue en 2018, destinée à lever des fonds pour protéger son environnement marin. Avec 15 millions de dollars souscrits auprès d’investisseurs internationaux, l’archipel a montré que les pays peuvent faire appel aux marchés pour financer l’utilisation durable des ressources marines. Les ressources collectées, cogérées par le SeyCCAT, le fonds fiduciaire pour la conservation et l’adaptation au changement climatique des Seychelles, et la Banque de développement des Seychelles, permettent de financer l’extension des aires de protection marines et une pêche durable.

Les DTS

Conscient que pour le continent, la priorité climatique reste l’adaptation, le directeur général du Fonds vert pour le climat, Yannick Glemarec, a rappelé que le Fonds s’est engagé à allouer 50 % de ses ressources au financement de l’adaptation. Parmi les solutions de financement possibles, il a mis l’accent sur le recyclage des droits de tirage spéciaux du Fonds monétaire international vers des actions d’adaptation. Le récent sommet sur le financement des économies africaines, le 18 mai à Paris, évoquait l’objectif de 100 milliards réalloués à l’Afrique pour constituer le socle d’un véritable « New Deal » pour le continent.

 

Avec en ligne de mire la COP26 à Glasgow, en novembre prochain, les pays africains attendent que les promesses se concrétisent. Un message bien perçu par le président de la COP 26, Alok Sharma, qui a déclaré : « Nous devons être à la hauteur des 100 milliards de dollars par an promis aux pays en développement jusqu’en 2025. »

https://www.lepoint.fr/

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