Conseillère du Président de la République, Chef du département de l’économie forestière, du développement durable, de l’environnement et de la qualité de vie, Madame Rosalie MATONDO est également Coordonnatrice du Programme National d’Afforestation et de Reboisement (PRONAR). Elle nous dresse un bilan des activités du ProNAR, trois ans après son lancement.
Afrique Environnement Plus : Trois ans après le lancement du Programme National d’Afforestation et de Reboisement (PRONAR), quelle lecture faites-vous à mi-parcours du niveau opérationnel de ce vaste programme d’un million d’hectares en 10 ans ?
Madame Rosalie MATONDO : Le programme s’exécute normalement. Les demandes de partenariat que nous avons reçues en faveur de l’afforestation dépassent nos prévisions d’un million d’hectares. Cependant, les partenaires industriels se sont heurtés à des conditions difficiles d’accès au financement et de preuve d’une sécurité foncière pour l’investissement dans notre pays. Il faut vous rappeler que le programme doit être mis en œuvre par les partenaires (privés comme publics, industriels comme petits promoteurs). Le rôle du PRONAR est de coordonner les différentes actions d’afforestation à travers des appuis ciblés. Aujourd’hui, nous sommes heureuses de vous annoncer que l’appui aux acteurs locaux prend de l’ampleur et que la campagne de planting avec les institutions suscite beaucoup d’engouement et nombreuses d’entre elles se sont inscrites à la prochaine campagne de planting. (octobre 2014 à mai 2015). Celle-ci sera élargie aux entreprises. Beaucoup de personnes veulent voir le PRONAR sur le front du terrain des opérations de planting.
Quels sont les différents acteurs impliqués dans la mise en œuvre du PRONAR et comment évaluez-vous leurs contributions à ce stade ?
Le PRONAR s’est doté d’une stratégie nationale d’afforestation et de reboisement. Celle-ci a classifié les acteurs en trois catégories que sont : les partenaires industriels qui devront réaliser environ 70% du programme ; les acteurs publics et le Service National de Reboisement (SNR) devront, dans le cadre des plantations domaniales, réaliser 20% du programme et les petits promoteurs locaux qui réaliseront 10% du programme à travers la mise en place des petites exploitations familiales ou communautaires.
L’une des valeurs ajoutées à ce programme est son caractère à contribuer à lutter contre la pauvreté, alors comment quantifiez-vous ses bénéfices pour les populations ?
De nombreuses personnes hésitent encore à s’engager dans l’afforestation parce qu’elles redoutent le caractère pérenne des plantations forestières et ignorent les bénéfices générés par cette activité à moyen et long terme. En effet, les bénéfices dans le cadre de la lutte contre la pauvreté sont nombreux. Nous pouvons citer : (1)-la création d’emplois à travers le développement des PME et PMI et dans les plantations à grande échelle ; (2)-l’amélioration des rendements agricoles grâce à l’agroforesterie ; (3)-la commercialisation des produits forestiers ligneux et non ligneux issus des pépinières villageoises ou de petites unités de transformation des huiles essentielles, du charbon de bois ou autres.
La réussite du PRONAR repose également sur votre capacité à pouvoir financer la création et assurer l’entretien de ces plantations forestières. Comment financez-vous ce programme et quelle est la place du secteur privé et des bailleurs de fonds extérieurs ?
Le PRONAR n’est pas un outil financier. Nous sommes à la recherche des outils financiers adaptés aux projets de reboisement, car les mécanismes existants actuellement dans notre pays ne permettent pas de garantir le financement des activités de reboisement. Le Gouvernement dans le cadre de l’amélioration du climat des affaires au Congo, étudie actuelllement dans quelle mesure les mécanismes innovants (fonds de garantie et fonds d’investissement) sont-ils susceptibles de prendre en compte l’afforestation et le reboisement. Toutefois, le PRONAR n’attend pas l’opérationnalisation de ces mécanismes innovants pour accompagner les partenaires locaux sous forme d’un appui technique et logistique. Dans le cadre de cet appui, nous accompagnons les promoteurs locaux à installer des pépinières pour la production des plants et d’autres à réaliser des plantations forestières. Les dispositions particulières comprises dans les conventions que nous signons avec ces partenaires prédéfinissent des engagements de chaque partie et allusion est faite également sur l’entretien de leurs plantations. L’entretien des plantations domaniales est assuré par le PRONAR et le SNR.
Pour conclure, quelles sont les priorités de votre feuille de route pour ces prochaines années ?
Les priorités pour ces prochaines années consisteront à :
- aider au moins un partenaire à finaliser un projet industriel et à procéder à la signature d’un bail emphytéotique avec le Gouvernement ;
- d’octobre 2014 à mai 2015, réaliser une campagne de masse de planting avec les institutions, avec les particuliers et avec les communautés urbaines et rurales ;
- concrétiser le maillage au niveau national en pépinières et plantations villageoises ;
- continuer à constituer la réserve foncière de l’Etat dans les autres départements comme la cuvette, la cuvette –ouest.
Tous les acteurs étrangers et nationaux sont invités à investir dans l’exploitation des services écologiques, dans la plantation d’arbres et dans la création des massifs forestiers en fonction des objectifs qu’ils visent. L’avenir de l’industrie du bois appartiendra à ceux qui auront pu se garantir une bonne part de leur approvisionnement sous forme de bois plantés, produits massivement aux portes des usines dans les plantations à croissance rapide.
Propos recueillis par Raoul SIEMENI